Le Sud marocain et le réveil du local

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Introduction

La décennie qui s’achève est marquée à l’échelle des pays sous-développés par deux contradictions majeures : a) L’omniprésence politique de l’Etat nation et son retrait au niveau des actions de développement ; b) La consolidation du local et l’affirmation du global. Cette position confuse et contradictoire met à l’épreuve la capacité des acteurs locaux de développement et pose avec acuité le problème de leurs dérogations et de leur droit à la décision et à l’action. 

Le Sud marocain est pris comme le reste du territoire national dans cette mouvance. La renaissance de la société civile, l’appel avec insistance à la participation des populations et à la démocratie dans l’action et la décision imprègnent partout le nouveau paysage local. S’agit-il d’un réveil de ce dernier, d’une réappropriation de l’espace perdu ou d’une simple réaction face à la marginalisation ? Quelle que soit la nature de ce qui se passe, le phénomène nous interpelle et nous interroge à la fois au niveau des concepts et de leur opérationnalité. L’émergence du local signifie-t- elle l’estompage du national - c’est à dire du centre - ou au contraire le renforcement de celui-ci ?

A) La tradition communautaire 

Si l’espace réservé à cet article ne permet pas de nous étaler sur les concepts du local, de l’Etat nation ni dans leurs délimitations ni dans leurs dérogations, celui-ci nous permet, néanmoins de nous interroger sur le sens à donner au récent éveil ou réveil des espaces locaux, face au national et au global.

a) Par local, nous entendons le cadre de vie le plus intime et le plus proche à l'individu et à la collectivité. C'est l’étendue chargée de sens et de symbolique qui incorpore le temps et l'histoire et qui conduit inéluctablement à des enjeux sociaux, politiques, économiques et de là à des conflits ou des solidarités. Le local est l'expression de la socialisation de l'espace par la communauté. L’appropriation de l’espace local est donc à la fois, le but, le sens et la finalité de la vie sociale. 

En effet, l’analyse de ce qui se passe au niveau des zones périphériques du Royaume a montré, partout, que la rareté des ressources, l’âpreté des conditions naturelles ont souvent forcé l’individu à adopter des comportements communautaires intenses. Dans ces contrées, l’homme ne s’identifie que par rapport à sa tribu, à son douar, à son lignage, à sa famille et par rapport à un espace socio-économique édifié par la communauté, pour la communauté et avec la communauté. La participation à la réalisation de l’œuvre communautaire, à son entretien et à sa sauvegarde est presque la raison d’être de l’individu. Les institutions communautaires forment, ainsi, l’ensemble des hauts lieux autour desquels se cristallise l’histoire locale. La mobilisation de l’eau, sa gestion, le gardiennage des champs, celui des parcours, la construction des greniers, des mosquées et des tours de garde forment autant d’occasions pour confirmer son identité et son appartenance à un espace et à une société. L’insertion de l’individu dans la vie communautaire passe obligatoirement par sa participation à cette vie dans toutes ses manifestations. Manquer un tel devoir peut causer un bannissement voire une exclusion totale. 

b) le douar : Quelle réalité ?

  • Essai de définition

Les concepts de Ksar, douar, igherm ou lmouda’ souvent collées aux différentes localités du Sud n’ont de sens que par rapport à un contenu humain, économique et spatial.  La gestion de ce contenu et l’histoire qui s’y rattache génère des lieux de solidarité et de conflits. L'analyse  des noms de localités montre une prépondérance des attributs se référant aux noms des personnes (Aït Aïssa, …), aux noms de fractions de tribu (Aït bouiknifen, …). Les noms s'inspirant des éléments de la nature sont aussi très fréquents (Tizi, Taourirte, Azrou; Anou-n'Izm…). Les établissements humains forment aussi une bonne partie de la liste ; ainsi, on y rencontre Ifri, Agouddim, … Les localités qui s'attribuent un nom de fonction économique ou sociale sont aussi présentes comme Imziln, Igourramn…

Les habitants d'une même localité revendiquent rarement l'appartenance à un ancêtre commun. Le sentiment d'appartenance à une localité prend probablement naissance à partir des intérêts économiques et sociaux communs. 

  • Dimension sociale :

Outre la dimension spatiale, chaque douar est composé d’une dimension sociale dont les lieux forts sont :

* La présence d’un ou plusieurs lignages, forts par leur poids démographique, par leur pouvoir politico - économique et social. 

* La mosquée pour faire la prière du Vendredi reste l’un des plus solides symboles de l’unité du douar. 

* Tigami n'taqbilt (la maison des hôtes) qui a pour mission d'accueillir les réunions de la jmaâ (conseil de la tribu ou de la localité), et surtout de recevoir les étrangers hôtes. 

* «La mçalla» : espace sacro-saint qui accueille les prières lors des fêtes religieuses. 

* Le cimetière qui, loin d’être un lieu neutre, forme un lieu symbolique très fort au sein du douar. 

* Les manifestations sociales telles les mariages, les baptêmes, les funérailles qui constituent un espace pour entretenir des rapports communautaires très denses. 

* Le "barouk " ou l'ouzi'a (sacrifice collectif) qui a souvent lieu à l’occasion des grandes fêtes religieuses. 

* Le grenier collectif (tighremt n’lakhzine), encore actif ou en ruine, ou simplement relique de la mémoire sociale qui symbolisait dans le temps la sécurité et l’unité communale. 

* L’eau, élément rare, symbole de vie, forme l’espace autour duquel s’est tissée toute l’histoire sociale des oasiens. Les discussions, la concertation permanente, qu’engendrent la mobilisation de l’eau, l’entretien des séguias, la répartition des droits d’eau, forme l’élément le plus compact qui unit ou qui départage les membres d’une communauté. 

* Le gardiennage des champs contre l’usure des hommes et des animaux, donne lieu à la naissance de l’institution de «boulghorme», personnage délégué par la jmaâ pour assurer le gardiennage des champs contre les vols et les empiétements pendant les périodes de grandes récoltes. 

* Le berger collectif, facteur économique très important, assure le gardiennage du troupeau villageois moyennant une partie du surplus de la production annuelle.

* Le taureau géniteur collectif est aussi acheté et utilisé en commun par tous les membres de la communauté. 

* Tiouizi est une prestation de travail gratuite que se font les différents foyers du douar les uns aux autres ou à une personne ou à un autre douar qui en fait la demande. 

  • Dimension spatiale :

Le finage d'un douar s'articule autour de plusieurs types d'espaces. On y distingue essentiellement l'espace habitable, caractérisé par son statut privé, avec ses enclos, ses aires à battre, ses séchoirs de bois et de fruits. Les espaces collectifs sont formés par les places publiques, les remparts, les portes, les rues, les halls d'entrée, mais aussi par tous les édifices communautaires tels la mosquée, le cimetière, les lavoirs et les abreuvoirs. L'espace économique du douar renferme surtout les terrains arables souvent irrigués et les zones de parcours qui les entourent. Dans le passé, la dimension de ces espaces diffère selon les caprices de l’histoire et de la géographie. Un douar, pour être complet doit aussi penser à sa défense. Les tours de garde "igoudman" sont un élément du paysage dont on rencontre encore aujourd'hui les vestiges le long de toutes les vallées sud-atlasiques. La gestion de ces espaces nécessite indulgence, entente, respect et surtout un sens de responsabilité de la part de tous les usagers. La charge sociale, religieuse, affective et économique qu'ont les lieux, rend compte de la complexité relationnelle dans un douar. 

  • La gestion des institutions du douar.

Le douar en tant qu'ensemble d'institutions, nécessite une maîtrise dans sa gestion. Sauf exception, il agit comme un seul bloc face à toutes les interventions extérieures et à tous les problèmes touchants l'intérêt de ses habitants.

Pour ce faire, le douar désigne un corps pour le représenter à tous les niveaux de l’organisation : la jmaâ. Les membres de celle-ci, recrutés parmi les représentants de chaque lignage, se réunissent dans un lieu public réservé à cette fin. Les assemblées sont annoncées lors des prières ou par des crieurs si l'affaire à traiter révèle un caractère communautaire urgent.

Les prorogatives assignés aux membres de la jmaâ sont d'ordre économique, social et politique. La jmaâ doit veiller sur la bonne gestion, la défense et le développement de son espace socio-économique.  

  • La gestion des institutions économiques.

Les décisions économiques sont prises au niveau du douar. Elles visent avant tout à responsabiliser l'individu, à le sécuriser contre les aléas et les menaces de tout ordre. Elles concernent principalement :

- La construction et l'entretien des canaux d'irrigation.  Pour assurer la continuité de l'irrigation, la communauté doit entretenir les canaux desservant les différents quartiers agricoles. A cette fin, elle désigne un responsable du réseau d'irrigation (allam ou amghar n'targa). Ce personnage axial dans la vie de chaque douar doit être au courant des différents droits d'eau, de la part de chaque ayant droit et de la mobilité des parts. Il constitue par conséquent un vrai registre foncier communal. 

- Pour préserver les cultures dans les champs jusqu'à maturité, la communauté désigne un ou plusieurs gardes champêtres. Ils sont choisis parmi les personnes honnêtes, disponibles. La fonction de bou-lghourme consiste à garder les cultures, les fruits et les herbes contre des éventuels vols ou empiétements de toute nature. 

- Partie intégrante du finage tribal, le parcours est soumis à une gestion aussi stricte, pareille à celle de l'eau. Chaque jmaâ du douar doit veiller sur la préservation des intérêts communautaires. Elle doit participer à l'élection du responsable de la protection et la gestion des parcours (l'amghar n'touga ou amghar n'ou agdal). 

- Dans le souci d'organiser la vie collective, la communauté décide aussi du calendrier des différentes activités agricoles (labour, irrigation, moisson, cueillette…) et peut même aller jusqu'à décider de la nature des cultures à mettre dans un quartier agricole, de la superficie à y cultiver.

- Enfin, le problème de la cession des terrains agricoles par vente ou héritage occupe beaucoup la jmaâ. Pour cette raison - entre autres - toutes les ventes sont soumises à discussion dans le cadre de la jmaâ. Le droit de préemption est de nature à défendre les intérêts de la famille, du clan et de la communauté. 

  • La gestion des institutions sociales

Le but ultime de toute société est la protection et la continuité de ses composantes. Un tel objectif ne peut se réaliser que par l'affirmation de l'identité, la protection des institutions dans un cadre dynamique, non figé.

La mosquée semble être l’expression institutionnelle à travers laquelle s’expriment toutes les manifestations communautaires. Ainsi, la jmaâ doit veiller sur l’emplacement, la construction de la mosquée, son élargissement, quand cela s'avère nécessaire. Elle se charge aussi de son entretien et de son équipement. La personnalité de l'Imam est aussi très importante dans le douar. Il doit être constamment présent, non seulement pour guider les prières, mais aussi pour assurer l'enseignement du Coran, écrire et lire des documents, assister à toutes les réunions importantes, être avec tous les invités de marque. C'est un homme de confiance. Le fquih est le seul homme qui a accès à tous les foyers, même en l'absence des maris. 

- La jmaâ du douar se charge aussi de collecter les dons offerts aux différentes zaouias. Ses membres prennent en charge tous les travaux et toutes les corvées afférents aux institutions religieuses et aux chérifs et morabites.

- L'accueil des hôtes et invités du douar est une vitrine au niveau de laquelle l'état des relations sociales et politiques se reflète. Chaque douar a le devoir de montrer son hospitalité pour aménager son image de marque. 

- Les caprices de la vie de nomade ou de transhumant ont aussi imposé aux communautés surtout montagnardes de s'organiser pour le stockage de leurs biens. Ainsi, les anciens documents collectés dans la région attestent d'une organisation minutieuse des greniers. Néanmoins, le gardiennage du grenier est assuré par un gardien permanent et des gardiens délégués par les lignages formant le douar. La responsabilité de chacun, une fois fixée est consignée dans un registre communautaire. 

- Le souci d'équilibre qui anime constamment la communauté lui impose d'opérer une sélection au niveau des gens à admettre au sein de la communauté de résidents. Tout nouveau venu doit absolument passer par la jmaâ. C'est la jmaâ qui se charge de fixer l'emplacement des différentes institutions sociales et celui des logements. Cet emplacement se fait en fonction de l'appartenance lignagère, du statut et du comportement social envers les autres membres de la communauté. 

Ce modèle de douar décrit n’existe plus ou il en reste peu. Avec l’avènement de l’Etat-nation, l’importance de ces institutions s’est atténuée. L’Etat s’approprie l’espace. L’esprit communautaire tend à disparaître sinon à s’estomper ou à se métamorphoser. En reste -t- il encore quelque chose aujourd’hui ?  

B) L’Etat-nation et l’espace local.

Animée par un esprit à dominante sécuritaire, l’administration moderne a partout favorisé l’altération, la décomposition et la recomposition de l’espace local. En effet, par son omniprésence l’Etat s’est substitué petit à petit à la communauté. Il a spolié, et à tous les niveaux, les rôles du concepteur aménageur, d’organisateur et de maître d’œuvre qu’occupait jadis la jmaa et les membres de la communauté. Le local doit donc occuper la place que lui réserve l’Etat et non celle qu’il se doit normalement. 

Cette mainmise de l’Etat, sur l’espace, est passée par trois principales phases :

1) La première est animée par un sentiment confus de peur et de besoin : la peur du communautaire et le besoin de s’en servir pour éviter les chocs. 

2) La seconde est caractérisée par un essai d’anéantissement du local et par le renforcement du national. L’Etat devient la source principale à partir de laquelle tout le monde puise.

3) La troisième est marquée par le retour au local pour différentes raisons :

• L’échec des modèles de développement orchestrés par l’Etat central ;

• L’augmentation des besoins en quantité et en qualité, et leur diversification.

Ce retrait, ajouté au mouvement de la mondialisation, a partout suscité un sentiment de crainte et de retour aux racines, à l’identité et au terroir.  Le contact avec le monde moderne par le biais de l’exode, de l’émigration, des programmes scolaires et des médias tend à généraliser le sentiment de la nécessité de se prendre en charge. 

C) La réappropriation de l’espace communautaire

Au sud du Maroc, si le recours à la distribution du collectif selon le droit coutumier, si la relative continuité dans la répartition et la protection des «agdals » selon des droits ancestraux, si l’application des droits  d’eau et des techniques d’irrigation, si la consolidation des solidarités autour des espaces religieux notamment les mosquées forment autant d’indices qui relèvent de la  résistance à l’érosion, il est aussi significatif de constater la façon dont  le local embrasse le national et l’international.

  • Emergence d'une nouvelle élite locale

L’appartenance à une communauté sous-entend l’adhésion à ses lois. Cette appartenance se fait par héritage, par le marquage de la territorialité et sa protection. L’intérêt de l’individu tout en s’identifiant à l’intérêt de la communauté passe inaperçu devant celui-ci. La communauté est souveraine sur tous les plans et dans toutes les circonstances. 

L’exploitation matérielle des espaces donne lieu à des situations de conflit qui nécessitent l’intervention des éléments de régulation tels les lois, l’orf ou la chariâ . Il faut donc mettre au point un arsenal de codes, en assurer la diffusion et surtout l’application et la protection.

Une telle situation a toujours nécessité la présence des organisations qui assurent la mise au point et la mise à jour des lois en fonction des nouveautés quotidiennes et en fonction de l’étendue de l’espace que nécessite l’épanouissement économique. L’ouverture qu’a connue le monde a aussi entraîné une complexité dans les relations (relations administratives, relations avec les marchés, la scolarisation, la monétarisation, la circulation intense de l’homme, des idées, des marchandises …) Toute cette complexité nécessite la formation et l’information et de façon continuelle. L’élite locale répond-elle à toutes ces exigences ?

  • Définition et composition de l'élite locale

Le concept de l’élite locale se prête à plusieurs interprétations. Pris dans son sens strict, le concept de l’élite se définit comme «ce qu’il y’ a de meilleur, de plus distingué » (Nouveau Larousse, 1967, p. 248). Certains auteurs ont rassemblé les deux concepts dans une même définition : « On entendra par élite locale, ou notable, les individus qui, tout en participant à l’exercice du pouvoir administratif ou judiciaire, ne font pas partie de l’administration comme des agents de carrière qui peuvent être déplacés d’un poste à l’autre ».  Ces différentes définitions posent elles-mêmes beaucoup d’interrogations : a) Quel est le référent du meilleur, du distingué, de l’autorité personnelle, etc. ? b) Les deux épithètes sont-elles du domaine de l’héritage ou des acquis, sinon comment y accède –t- on ? c) Sont-elles des caractéristiques durables ou temporelles ? d) A qui accorde–t-on le droit de porter un jugement sur telle ou telle personne et à partir de quels critères ?

En l’absence d’une définition précise et adaptée à notre réalité, et partant de ces interrogations, il nous est apparu raisonnable, qu’avant de parler des élites, d’en constituer une liste, même partielle, pour analyser le contenu du concept et le profil de ces ²distingués². 

Cette liste permet de ramener nos critères d’élection à ce qui suit :

* L’appartenance à une famille enracinée dans la zone. 

* Avoir une assise économique confortable ;

* Avoir la possibilité de mettre les charges des autres sur son compte ;

* Avoir une personnalité forte et respectée, pour pouvoir trancher dans les affaires courantes et pour avoir une influence sur les autres ;

* Avoir des qualités personnelles, telles la limpidité, la sagesse et l’intelligence ;

* La crédibilité d’un chef doit obligatoirement se manifester à chaque instant à travers l’innocence de sa fonction, de ses paroles et de ses actions. 

* Il faut pouvoir partager ses richesses avec les autres. A l’intérieur d’un groupe, l’obligation de faire des dons limite l’accumulation. Un prétendant à la notabilité doit incarner l’image d’une zaouia ou de l’Etat. Il faut collecter pour redistribuer ;

* De préférence être père pour être stable et responsable ;

* Etre de sexe masculin et âgé ;

* Avoir une profonde conviction religieuse.     

Ainsi, dans une société fortement hiérarchisée, les institutions de régulation s’efforcent, en principe, de fonder une société égalitaire, mais dans la réalité, l’ordre traditionnel, archaïque soit-il, se poursuit. Il est donc clair que l’ensemble de ces critères cité ci-dessus n’apparaissent que chez trois grandes catégories de personnes :

a) Celles qui profitent d’un capital spirituel pour s’imposer aux autres. 

b) Dans une société où le savoir n’est pas à la portée de tout le monde ceux qui le possèdent en font un capital. Les Imams et Fquih jouent d’un prestige considérable. Le fait de pouvoir lire et écrire leur donne un pouvoir que le commun des gens ne possède pas. 

c) Les personnes riches commencent souvent par mettre à la disposition de la communauté une partie de leurs biens accumulés soit sous forme d’aide, de postes de travail ou de prise en charge d’une partie des dépenses du douar. Ils contribuent plus que les autres à la mise en œuvre de la politique commune. A terme, ils sont tentés de transformer en puissance politique l’influence que la fortune leur assure. La mise en œuvre des grandes décisions dépend de la contribution des citoyens aisés. Ce sont eux qui contrôlent la force publique : Ils sont capables de régler les dépenses communes ; Ils se chargent de financer certains services ; Ils préparent les fêtes ou cérémonies collectives ; Ils aident les pauvres et les nécessiteux.

Ces charges sont acceptées et assumées volontairement car elles garantissent une grande influence politique et permettent le contrôle direct des mesures arrêtées par la collectivité et désarment les critiques. 

Les deux premières couches étant en principe à l’écart du temporel, utilisent souvent le capital moral pour aménager leur place, alors que la troisième fait usage du capital matériel. C’est cette dernière qui a souvent sécrété l’élite formant tous les agents dont usait jadis le Makhzen pour contrôler le local. Après l'indépendance, face à la pression des besoins qui ne fait qu'augmenter quantitativement et qualitativement, le malaise augmente. L'Etat devient l'acteur principal de développement et renforce partout sa présence. 

Face à une telle situation, le faible niveau de vie que mène encore la plupart de la population, le fort taux d'analphabètes, le faible encadrement socio-éducatif, l'inadéquation des discours des agents de développement, ne favorisent ni l'entente, ni l'épanouissement. L'hésitation entre le maintien du traditionnel ou l'introduction du nouveau reste le trait saillant de l'état présent. L’Etat cherche de nouveau un interlocuteur après l’avoir neutralisé. 

  • Le chemin de la notoriété.

Il est intéressant de se demander si les non notables de souche peuvent un jour prétendre à la notabilité ? En d’autres termes, existe–t-il d’autres chemins pour l’ascension sociale autre que l’héritage ? En fait, l’analyse de l’itinéraire d’un certain nombre de nos élites nous permet de tracer au moins trois chemins modèles. 

a) Le chemin de l’école : L’accès à l’écriture, à la lecture est une véritable clef pour améliorer sa situation sociale. Mais, la vraie réussite ne commence qu’avec l’aménagement d’une situation socio-économique stable. Dans le contexte qui nous intéresse, pour ²réussir sa vie², il suffit juste d’avoir un niveau du collège et ensuite se verser dans les affaires ou dans la politique. 

b) Le chemin de l’émigration. Traditionnellement perçue comme une honte, le fait de quitter ses origines a acquis une valeur sociale positive avec la migration internationale. En fait, celle-ci a permis la soustraction de plusieurs personnes à des servitudes auxquelles elles ont été assujetties. Les anciens haratin, khammès, artisans ou ouvriers agricoles passent d’un état presque de vassalité à un système de salariés, bon à tout faire ou ouvriers spécialisés, auxquels on accorde le droit de se défendre ou de se faire défendre  par des organisations syndicales. Cette métamorphose, si elle n’a pas grande signification au niveau des pays d’accueil, pour ceux du «bled », elle est la vraie réussite. 

La traditionnelle hiérarchie s’estompe, mais les différences de richesse, de considération et de statut ne disparaissent pas. La vie sociale repose toujours sur la compétition pour le prestige. L’accumulation des richesses autorise des consommations ostentatoires pour témoigner de la réussite sociale et prouver que l’on a bien joué son rôle dans la collectivité. Après, la richesse change de signification. Elle cesse d’être désirée pour elle-même et pour le pouvoir qu’elle donne sur les choses. On travaille désormais pour affirmer aux yeux de tous qu’on appartient à une élite. La richesse devient signe, c’est à dire un moyen de promotion sociale. 

La quête de reconnaissance, le souci d’ajouter au capital financier un capital politique et social, poussent les ambitieux à se lancer dans l’aventure des alliances d’intérêt avec des familles, des clans et des partis. C’est le moyen le plus simple pour rayonner et la voie la plus commode vers la puissance du pouvoir et celle de la richesse.  

c) Le chemin de la fonction publique. Le troisième chemin d’accès à la notoriété passe obligatoirement par le canal de l’administration. Ce modèle d’ascension sociale est le plus connu. Les membres de la haute administration de l’Etat-Nation moderne constituent une élite politique et sociale détentrice de nombreux attributs de pouvoirs. 

Dans la zone qui nous intéresse, la pénétration tardive de l’école, l’esprit pragmatique des ruraux, la sensation de non intégré qui anime les gens du Sud, les éloigne des postes de responsabilité. Ce sont des techniciens de confiance et de hautes qualités, mais qui travaillent souvent dans l’ombre.  Sans mémoire sociale dense, sans héritage du clientélisme, ils ne peuvent vraiment émerger, de façon rapide, que s’ils se penchent sur le groupe familial et communautaire ou s’ils cherchent la légitimité auprès de l’administration ou au sein d’un corps qui les impulse. 

Face à ce retrait, l’administration qui butte contre la complexité de la vie, l’incapacité des fonctionnaires, souvent de souche urbaine, de comprendre et de résoudre les problèmes ruraux, fait appel à des éléments locaux de régulation. Ils forment le dernier maillon du réseau de transmission de l’administration.

Aujourd’hui encore, l’émergence d’une élite locale reste tributaire de la seule volonté de la communauté et de l’aval que les autorités réservent à son choix. Et tout prétendant doit absolument tenir compte de ces paramètres et non pas de ses seules convictions. Les comportements observés lors des différentes compagnes électorales dans ce domaine sont très divers :

a) Le candidat laisse courir la rumeur et observe les réactions, avant d’annoncer sa décision en fonction du feed-back de la communauté.

b) Le candidat réunit la communauté pour consultation avant de prendre sa décision et de se lancer dans la compagne.

c) La communauté, à travers la jmaâ, prend contact avec la ou les personnes adéquats pour les pousser à se présenter en les assurant du soutien inconditionnel de ses membres. 

d) Prendre le risque de se présenter, indifféremment de ce que sera la réaction des autres est conçu comme un défi. Il peut générer des situations incontrôlables. C’est ainsi que, mis à part les Centres urbains, les étrangers à la communauté n’ont aucune chance au niveau des élections locales, par exemple.

e) Prendre contact avec les gens influents en utilisant les liens familiaux et des procédés de régulation tels l’âr, le sacrifice, l’influence d’une zaouia… pour obtenir leur aval.

Les méthodes d’appréhender les électeurs sont par ordre de fréquence (c), (b), (e), et enfin (a). Les sécrétions de ce processus, malaxant le traditionnel et le moderne, mais politiquement et publiquement reconnues, seront donc le sujet de la suite de nos analyses. Le but est de dégager les lieux de force et de faiblesse du corps des représentants, image des mutations de notre campagne.

  • La nouvelle structure de l’élite élue. 

La principale remarque mise en valeur lors des dernières élections communales est la participation massive des jeunes. Tous les partis ont fait du «marketing politique » en jouant la carte de la jeunesse. Ainsi, à l’échelle nationale, les candidats ayant entre 24 et 44 ans représentent 60% et ceux dépassant 54 ans ne comptent plus que 14% en 1997. A l’échelle de la zone de Boumalne-Dadès, la tendance est encore au conservatisme.

Les enquêtes qualitatives menées à propos de la représentativité ont montré l’existence d’un conflit aigu entre les générations. Les jeunes et les vieux se jettent la balle en ce qui concerne la question de savoir sur quel compte il faut mettre la crise socio-économique que traverse le pays. Mais la tendance, au rajeunissement et à l’ouverture des élus, qui se dessine à l’échelle nationale n’a pas encore pris le chemin du Sud. Les vieux rouliers de la politique, souvent analphabètes, refusent qu'on leur parle de la relation probable entre une «formation politique » et une «formation académique ». Ce sont à leurs yeux deux choses différentes. 

Comparée à l’échelle nationale, la zone a accumulé un retard de plus d’un demi-siècle. Le taux de ceux qui ont un niveau dépassant le collège, est presque 4 fois inférieur à ce qu’on rencontre au niveau national. Plus de la moitié ne sait ni lire ni écrire. Les 2/3 des élus n’ont pas eu accès au secondaire. 

 

On imagine donc très mal comment ces «élites » peuvent comprendre et défendre les intérêts de ceux qui attendent à la base. Certes, ces élus comprennent relativement mieux que les intellectuels, loin de la scène, les problèmes qu’ils affrontent de façon  quotidienne, mais comment les faire comprendre aux autres, comment les intégrer dans des plans nationaux ou régionaux de développement et surtout comment les faire passer dans la logique de l’Etat-Nation et de la mondialisation ?  

L’apparition des étudiants, des «chômeurs » est un phénomène nouveau qui nécessite une grande attention. La catégorie des fonctionnaires, si elle occupe plus d’un quart des places, reste dominée par les enseignants. Ceci se justifie à la fois par leur présence massive au niveau de tout le territoire et par leur répartition très diffuse par rapport aux autres fonctionnaires. Leur interpénétration avec les populations, leur capacité de communiquer leur donnent avec les agents de santé une priorité justifiée dans le domaine. Le fait qu’ils discutent quotidiennement des problèmes des gens, de l’éducation, leur donne un statut que les autres catégories socioprofessionnelles ont du mal à avoir. 

Les professions libérales dominées par celles des entrepreneurs est un fait nouveau. Il est lié à l’émigration. En fait, outre la dynamisation du marché du bâtiment, la migration a mis à la disposition de beaucoup de gens à la fois des techniques et de l’argent.  La notoriété dont bénéficie un entrepreneur surtout auprès des ouvriers et de leurs familles est à cet égard fondamentale. Les élections sont une occasion de la mettre à l’œuvre. 

Certes, à un moment où les valeurs sociales et religieuses ne sont plus mobilisatrices, l’encadrement des partis politiques, des associations, bref de la société civile devient primordial. La société a-t-elle assumé ce rôle convenablement ? Hélas, non !   En fait, les cellules actives des partis et des associations sont pratiquement absentes hors des centres urbains et des grandes agglomérations. 

Ceci dit, il est tout de même intéressant de compléter notre panorama par le tableau de la répartition des sièges selon l’appartenance politique.

Longtemps réputés comme les partis de campagnes, les trois excroissances de l’ancien parti «F.D.I.C » formées par M.P, M.D.S et M.N.P confirment cette tendance et cumulent 40,4% des sièges. Le M.P, malgré son léger recul localement par rapport à 1992, continue à être le premier parti à l’échelle même de la Province. Il est le seul parti qui a assuré pratiquement une pleine couverture au niveau de toutes les communes. Le capital social que lui accorde un de ses membres, originaire de la région est fondamental.

Le régionalisme, le linguisme sont ici exploités à fond. Les partis de gauche, toujours confinés dans les villes (U.S.F.P, P.P.S, O.A.D.P) commencent à peine à investir la zone. Ils trouvent des partisans surtout parmi les foules de mécontents formés par les jeunes éjectés par le système éducatif ou diplômés sans emploi. L’Istiqlal, parti traditionnellement connu comme parti nationaliste continue à avoir des fidèles parmi ceux qui ont ²prêté serment² au lendemain de l’indépendance, mais son audience diminue chez les jeunes. Le R.N.I, même en légère baisse, localement, améliore son score à l’échelle de la Province, grâce à la position économique et au dynamisme de son coordinateur régional. Les partis de l’U.C. et du P.N.D, assez bien représentés en 83 et 92 ont complètement abandonné la scène.  Les candidats SAP qui représentent environ 10% ne sont pas toujours à considérer sous un angle négatif, ils représentent les nouveaux venus dans la politique, ceux qui ne croient plus aux «principes » pratiqués par les «nomades ou les habitués de la politique ». Quand on les force de s’aligner, ils adhèrent au premier venu ou au plus offrant. 

En conséquence, le devant de la scène politique est localement, aujourd’hui, départagé entre quatre grands groupes d’élites :

  1. Une élite traditionnelle qui se bat pour perdurer : Elle est formée des grandes familles ayant occupé la scène depuis le XIXème ou le début du XXème siècle. 2) Une nouvelle élite formée principalement de fils d’émigrés ayant fréquenté l’école dans une ville où ils n’arrivent pas à s’intégrer facilement : Une replongée dans le bled permet de retrouver racine et identité. 3) Une élite de migrants retraités qui, après avoir vécu un temps à l’étranger bénéficient d’une indemnité de retraite substantielle leur permettant de se positionner au niveau de toutes les affaires traitées localement. Le désir de l’ascension sociale, de défendre leurs intérêts matériels les poussent à chercher un soutien politique et administratif.  4) Les diplômés chômeurs forment aussi une composante non négligeable du paysage. Leur sentiment d’être à la marge, leur oisiveté, les regards qui les dépistent chaque jour, l’espoir de se voir un jour intégré, les poussent à se lancer dans les bras des premiers offrants. Une telle situation a débouché sur la réussite d’un certain nombre de spécimens dont on compte une jeune fille, licenciée en philosophie, lors des communales. Elle est la première femme à se présenter et à accéder à un poste d’élu dans l’histoire de la zone, et elle s’est, même, portée candidate à un siège de parlementaire sans succès. 

Malgré cette situation caractérisée par la perplexité, le rôle de la jmaâ et des notables, longtemps marginalisé ou tenu en veilleuse, s'estompe encore derrière les différentes institutions qui gèrent le quotidien. Les institutions traditionnelles, non reconnues officiellement et non complètement ignorées, gèrent cette contradiction en s'ingérant dans le quotidien des populations tout en s'appuyant sur le moderne. Sommes-nous devant un état de reconnaissance ou de faiblesse mutuelle ?  

Le groupe des élus sécrété par les urnes, complètement désarmé, se trouve confronté à une situation en pleine transformation. Ils doivent se positionner en interlocuteurs face aux responsables et aux techniciens de l'administration et participer au développement local. Le peu de compétence dont ils disposent et la ténacité avec laquelle l'ancienne élite et les techniciens s'attachent au pouvoir risque de mettre en péril toute l'expérience. Dans un tel contexte, la participation du local ne se conçoit que sous la pression ou sous forme de résistance à la marginalisation socio-économique et spatiale. Il est bien évident que les difficultés locales ne trouveront jamais de solutions au sein d’une politique de développement nationale, normaliste. 

Face à cette mouvance, les organes officiels, les traditionnels partis politiques ont perdu, crédibilité. Les nouvelles formes associatives semblent être un apanage. L’Etat, qui souvent regarde avec un œil méfiant ce genre de mouvement, s’en empare pour le dissiper, l’amortir ou le canaliser. Il crée plusieurs associations à rayon local, régional voire national. L’expérience, malgré son caractère officiel, a généré une dynamique et une conscientisation des populations. La nécessité de s’organiser, de participer, bref de se responsabiliser et de s’engager, s’affirme. La lutte contre la passivité est sollicitée dans tous les secteurs afin d’éviter de créer des assistés et afin d’assurer la durabilité du processus de développement. Le caractère éphémère des projets de développement nécessite l’engagement de tous.  

C’est ainsi que les deux dernières décennies ont vu naître à l’échelle nationale, régionale et locale des dizaines et des dizaines de structures associatives. Sont–elles le signe d’une vitalité ou d’une simple mode ? L’analyse de ces structures, au niveau local, et selon le mode de création, met en relief trois genres d’associations :

* Des associations créées et soutenues par les organismes de l’Etat. Elles concernent des associations dites d’utilité publique, des associations d’irrigants, des coopératives de production, de commercialisation, de service et des comités villageois. En fait, pour faire face aux exigences des organismes internationaux qui conditionnent leur participation au développement par la participation des populations bénéficiaires, l’Etat initie ou impose parfois ces structures sans âme. 

* La deuxième catégorie de ces associations est souvent initiée par l’élite intellectuelle. Elle y cherche la légitimité pour mener une campagne électorale, ou remédier à une crise sociétale et à une situation de marginalisation. Ces associations investissent le domaine de la culture, du sport, de l’environnement, de la santé, de l’éducation… 

* Traditionnellement connues dans le monde rural, les associations indigènes ou communautaires se distinguent par leur caractère informel, conjoncturel et par leur approche souple. Juridiquement non approuvées, elles s’appuient sur les solidarités autour des divers lieux d’intérêt communautaire et reposent sur le dispositif ancestral qui constitue le fondement de la société rurale. Aujourd’hui, ces associations investissent de nouveaux champs d’action plus modernes, tels l’électrification ou l’eau potable. Elles se transforment même en caisses d’épargne, de crédit, en mutuelles et marquent ainsi un retour au "capital social" communautaire local.           

En parallèle à ces nouvelles structures, les institutions traditionnelles, même dans l’ombre, conservent et jouent encore leurs rôles d’acteurs locaux agissant sur le cours et le déroulement des événements. Cette coexistence, ce parallélisme entre différentes structures est une spécificité et un aspect que tout projet de développement, visant la réussite, ne doit pas ignorer, et doit l’intégrer.

En effet, à part les coopératives, les associations sportives et culturelles, qui sont un phénomène quasi urbain, le mouvement associatif le plus intense se rencontre, aujourd’hui, sur les marges oasiennes ou montagnardes (Tata, Ouarzazate, Zagora, Figuig, Taroudant…). Les quatre ou cinq dernières années ont connu une prolifération des associations. Cette prolifération pose même des interrogations quant à la signification réelle du mouvement. Partout, on estime qu’on peut considérablement améliorer la qualité des interventions en matière de développement par le recours au savoir-faire à l’expertise des locaux et à la souplesse des organisations locales. Mais d’autres objectifs sont aussi assignés à ces organisations : a) La mobilisation des ressources financières et humaines de sources diverses ; b) La contribution au dialogue, la conceptualisation des idées et la formulation des projets de développement ; c) L’encadrement et la formation dans un cadre de partenariat équitable et en faveur du local ; d) La protection de l’environnement.  

Si l’espace géographique (espace projet) reste souvent le principal catalyseur de cette nouvelle société, le sentiment ethnique, l’appartenance à la même entité, créent sa cohésion. 

Les secteurs investis par ces associations embrassent le développement communautaire dans ses composantes les plus diverses. Il faut cependant noter qu’un changement s’est opéré dans ce sens : Il y a presque 10 ans, les seules associations connues dans la zone ont un caractère culturel ou sportif ; aujourd’hui, avec l’ouverture politique, le développement, la lutte contre la pauvreté et l’exclusion deviennent des axes privilégiés. L’électrification rurale, l’alimentation en eau, les routes, la lutte contre les catastrophes, la lutte contre l’analphabétisme, contre la pauvreté, contre les maladies endémiques et par conséquent contre l’exclusion socio-économique forment les principaux champs de bataille. 

Ainsi, une typologie simple distingue selon les situations administratives deux catégories d’associations : a) des associations non formelles mais qui réunissent des personnes autour d’un projet sans aucune formalité administrative ; b) des cas d’associations formelles, constituées selon les lois et les règles connues et reconnues. 

Ces associations ne se substituent nullement aux actions de l’Etat, mais les secondent. Le local, le régional, le national et l’international doivent dorénavant entrer dans un partenariat qui vise l’éradication de la pauvreté, de la marginalisation et de l’exclusion. 

CONCLUSION

Malgré son âge encore récent, l’analyse du phénomène associatif au Sud du Maroc permet déjà de tirer les enseignements suivants :

• Le rôle des relais extérieurs dans le dynamisme du local.

• Le rôle saillant des règles et traditions communautaires dans la réussite des nouvelles institutions.

• Le local a fait preuve de sa maturité au niveau de la gestion rationnelle de son espace. Il s’impose dorénavant, et dans tout aménagement, comme partenaire mûr.

• Ce réveil, s’il est louable, pose le problème de la durabilité du mouvement, mais aussi celui de la réaction de l’Etat central. Adoption, complémentarité, antagonisme ?  C’est là tout le problème de la démocratie.