Sensualité et spontanéité ressortent des toiles de Hamid Douieb. Il a tenté auparavant le surréalisme et l’hyperréalisme. Actuellement, il définit sa peinture comme figurale et non figurative. Le corps féminin est à la fois un thème et un support de prédilection comme le sont les visages et les mains.
Bien que ce soit en Belgique que Hamid Douieb a découvert sa vocation d’artiste et où il s’est imprégné de ses tendances artistiques, c’est au Maroc qu’il revient pour une reconnaissance.
e-taqafa : « Figural », pourquoi ce titre ?
Hamid Douieb : Parce que je ne suis pas que figuratif…ma peinture donne à voir plus qu’elle ne montre. Les figures prennent un sens différent de leur sens habituel.Ma dérive figurale se définit en opposition au figuratif et s’exprime plus par la force que par la forme.Ma recherche figurale n’est pas dans le visible, mais dans le lisible et se nourrit d’une force invisible qui tendvers la sensation... Je ne renonce pas à la figure et je prends la voie du figural pour rompre avec la représentation, pour casser la narration.Une approche pure qui fait sens, sans faire histoire.
e-taqafa : Votre travail artistique a-t-il connu des changements ?
Hamid Douieb : Oui, bien sûr ! J’ai d’abord été surréaliste dans les années 70 après hyperréaliste et puis figuratif avec contenu, jusqu’à ma rencontre avec le groupe « Figuration critique » et depuis j’ai ressenti le besoin d’aller au-delà de la figuration et de me rendre à l’évidence que ma peinture est plus figurale que figurative. Je reste farouchement en dehors des modes et tendances.Mais ceci reste évidemment juste mon avis.
e-taqafa : Pourquoi la femme est-elle un thèmeprivilégié ?
Hamid Douieb : C’est vrai que pendant des années je me suis exprimé à travers le corps féminin que je trouve universel, mais après, j’ai trouvé aussi dans l’expression des visages et la gestuelle des mains et dans leur langage une source inépuisable d’inspiration.
e-taqafa : Le nu est un genre omniprésent dans vos toiles, pourquoi ce choix ?
Hamid Douieb : Il a été omniprésent et a représenté un univers onirique très riche, mais depuis dix ans mes sources d’inspiration se sont diversifiées, mais curieusement toujours avec comme support le corps humain...
e-taqafa : Votre résidence en Belgique a-t-elle marqué votre création notamment par le choix des couleurs froides ?
Hamid Douieb : Évidemment la Belgique a marqué ma peinture. À mon arrivée en Belgique c’est ma découverte du tableau de René Magritte « L’empire des lumières » qui m’a donné envie d’être peintre.Mes inspirations, mes influences c’est ici qu’elles ont pris racine et mes tentatives d’un retour au Maroc ne datent que dedouzeans.
e-taqafa : Vos techniques sont multiples : jeu de clair-obscur, travail sur les plans, est-ce important que le tableau ait un univers particulier et différent à chaque fois ?
Hamid Douieb : Mon travail ce sont d’abord des dessins au crayon ou à l’encre, qui deviennent parfois une peinture ou un dessin peint. J’utilise souvent sur le même tableau à peu près tout ce que j’ai appris.Mon univers reste un peu secret, puisque je refuse d’avancer un concept aux personnes qui regardent mon tableau et que j’invite à narrer leurs propres visions.Je refuse l’approche intellectuelle et je donne ma vision de l’artiste :pour ma part, l’artiste est un être qui a développé une sensibilité, une imagination et une fragilité qui le rend démuni devant la logique et l’intelligence normalisée...Et c’est cette particularité proche de la folie qui lui donne le don d’exprimer autrement les autres multiples réalités.
e-taqafa : Que représente pour vous ce retour au Maroc par cette exposition à l’Espace Rivages ?
Hamid Douieb : Pour moi, cette exposition à l’Espace Rivages prend la forme d’un retour « à la terre promise ».Mon espoir ne réside pas dans la réussite ni le profit, je ne souhaite qu’une reconnaissance, et laisser quelques traces de mon passage et une satisfaction de n’être pas retourné pour rien...Je suis un vieux peintre irascible qui n’a plus le temps pour les compromis...Je reviens d’un long voyage les lèvres sèches et le cœur gros, je reviens vieillissant retrouver ma terre de naissance comme un saumon qui remonte la rivière.
Propos recueillis par Fatiha Amellouk pour e-taqafa.ma