A l’école, il préférait dessiner sur les cahiers au lieu de suivre les cours. Faute de moyens, il fabriquait lui-même ses jouets. Remarquant sa passion, son professeur de français organise un concours de dessin à l’Ecole Benabbad à Casablanca. Âgé de 10 ans, Rachid Hachami remporte le premier Prix.
A 15 ans, il présente sa première exposition à Casablanca et à 19 ans, il quitte le Maroc pour poursuive des études supérieures d’art en France.
De l’art figuratif, il évolue vers l’abstrait. Il obtient en 2004 le premier Prix du Concours Européen de Peintures à Mainz en Allemagne. L’exposition « les détails, un ensemble » de Rachid Hachami est conçue dans la couleur et la matière.
e-taqafa : Comment le détail définit-t-il votre création ?
Rachid Hachami : Le détail est une façon de regarder autour de soi, de bien connaître la réalité. Fixer les détails contribue à aborder la réalité, comme quand notre regard se perd dans une brume pour flouter tous les détails, ne laissant que l’essentiel.
e-taqafa : Quel est l’élément le plus important dans vos créations : le détail ou la couleur ?
Rachid Hachami : Il y a tant de choses qui m’intéressent dans ce monde, je suis curieux de nature comme beaucoup d’artistes. Chacun à sa manière, la mienne est basée sur l’observation et l’analyse. J’observe et j’analyse le détail ou la couleur parce que les deux se confondent dans le même regard, le détail devient couleur et la couleur devient détail, tous les deux dépendent de l’intérêt de l’artiste. Pour moi, les deux forment l’ensemble.
Dans mon travail, ce sont la gestualité, la patience et l’observation dans la composition geste- transparence et couleur qui sont importantes comme tout ce qui se dégage de l’artiste.
e-taqafa : Quels sont les thèmes que vous abordez dans cette exposition ?
Rachid Hachami : J’ai un thème principal c’est l’Homme, c’est mon ensemble ce qui l’entoure se sont les détails. Chaque fois que je traite un sujet, il y a l’homme dans son ensemble. Pour cette exposition, j’ai travaillé plus le geste, la couleur et la matière-transparence. Inspiré par mon voyage en Island, je commence au Maroc, à l’occasion de cette exposition à l’Espace Rivages, un travail sur l’eau, l’air et le feu. Trois séries sur ces trois thèmes sont proposées. Par ailleurs, j’ai réalisé une série de 24 tableaux qui présentent la transformation du ciel pendant 15 min. Je présente pour cette exposition 9 de ces 24 tableaux où le ciel -détail change avec le temps. Le thème volcan est évoqué également puisque je démarre un projet sur le feu par la matière.
e-taqafa : Est-ce que les couleurs du Maroc vous inspirent ?
Rachid Hachami : Le Maroc m’inspire par les couleurs, les matières, les traditions, les souvenirs, le folklore, la chaleur… Tout ce que je crée a une relation avec ce que j’ai vu et j’ai vécu au sein de ma famille. Par exemple, mon père qui travaillait dans les démolitions m’inspire pour manipuler le béton qui est une matière dure qui nécessite un effort physique et que je mets dans un cadre artistique et créatif. Quand je parle de la notion du va –et- vient dans mes créations, j’ai le souvenir de ma mère qui a immigré pour travailler à Londres pendant six ans, j’étais adolescent, et elle faisait des allers-retours. L’absence de ce repère qui est ma mère a ouvert les portes vers l’immigration. En fait, tout est lié : la famille, le Maroc, la création, l’immigration…
e-taqafa : L’immigration est-elle, un détail important dans votre vie ?
Rachid Hachami : L’immigration est un ensemble, les évènements sont les détails. Ma migration est vécue comme celle de beaucoup d’autres marocains qui décident de vivre loin de leur mère patrie, une décision très compliquée avec tous les avantages et les inconvénients. L’homme par nature est un nomade qui cherche toujours un espace ou un endroit pour s’y retrouver. La question parfois ne se pose pas mais elle s’impose. Pour moi les études étaient la cause de mon départ et je crois que j’assume mon rôle comme un bon « zmagri » et un bon marocain tout simplement.
e-taqafa : Que représente pour vous ce retour au Maroc pour exposer à l’Espace Rivages ?
Rachid Hachami : Quand je quitte mon pays je quitte d’abord ma famille, avant mon pays. Quand je reviens, c’est pour eux et pour le pays. Mon père n’a jamais vu mon travail, ma mère a vu quelques tableaux de mes débuts artistiques. Les deux sont décédés. Je suis de retour pour montrer mon travail qui a atteint une certaine maturité dans son ensemble. Ce retour est symbolique, c’est un début pour être présent plus souvent au Maroc.
J’ai réalisé une bonne partie de l’exposition lors de mon séjour au Centre d’accueil de la Fondation Hassan II pour les Marocains Résidant à l’étranger à Kénitra, je tiens à remercier le personnel du Centre pour leur accueil, leur sympathie et le confort qui m’ont offert pour la création et la réalisation de cette exposition, car sans ces éléments il est difficile de créer.
Propos recueillis par Fatiha Amellouk
Pour e-taqafa.ma