Festival événement, le Festival du Film de Locarno a invité pour sa 68e édition, de jeunes cinéastes marocains, à présenter leurs projets de long-métrage à travers la section Open Doors. Saluée par la profession, cette initiative consacre un focus au 7e art maghrébin qui a réuni producteurs et auteurs du 5 au 15 août 2015. Entretien avec Ananda Scepka, sa responsable, qui éclaire l'histoire plurielle de ce laboratoire de films jouant sa nouvelle séquence.
e-taqafa : Quels sont les objectifs du laboratoire de coproduction Open Doors ?
Ananda Scepka : Notre objectif principal est de soutenir des cinéastes et producteurs de talent, provenant de pays du Sud/Est du monde, dans leur recherche de potentiels partenaires pour leurs projets de films. Depuis 12 ans notre partenaire principal, la Direction du développement et de la coopération (DDC) du Département fédéral des affaires étrangères suisse nous soutient dans notre parcours et nous a permis, de mettre en lumière des cinématographies parfois moins connues par le public mais non moins passionnantes.
Chaque année, nous nous concentrons sur une région du monde différente et choisissons une douzaine de projets de films en différents stades de développement. Les porteurs de projets sont invités à Locarno pour y rencontrer des producteurs, mais aussi des représentants de fonds, vendeurs et programmateurs.
Le programme consiste au sein de rencontres professionnelles, mais aussi par le biais d’ateliers faits sur mesure qui permettent aux réalisateurs et producteurs invités d’échanger : dans un cadre confortable et de confiance, avec des professionnels européens sur des thématiques variées (sources de financement, ventes internationales). Depuis l’année dernière, grâce à un partenariat avec le TorinoFilmLab, nous offrons également à certains projets des sessions de travail dédiées au scénario.
e-taqafa : Pourquoi la treizième édition est-elle consacrée à quatre pays du Maghreb, Maroc, Algérie, Tunisie, Lybie ?
Ananda Scepka : Nous avons choisi de nous concentrer sur le Maghreb dix an après avoir, pour la première fois, présenté des projets et une sélection de films achevés de cette région, et en incluant de plus, la Libye. Après deux éditions dédiées au Continent Africain (et en particulier les pays au sud du Sahara en 2012 et 2014) il nous a semblé opportun de retourner sur les riches cinématographies de ces pays qui se trouvent dans des contextes désormais différents, et où nous avons observé, ces dernières années, l’émergence de nouvelles voix : qu’il nous a semblé important de présenter tant à l’industrie qu'au public présent à Locarno.
Festival du film de Locarno
e-taqafa : Comment s'est opérée la sélection des trois jeunes cinéastes marocains, Fyzal Boulifa, Alaa Eddine Aljem, Hassan Legzouli ?
Ananda Scepka : Notre équipe a effectué plusieurs voyages au cours de l’année dernière afin de rencontrer un maximum de porteurs de projets en personne. Au Maroc nous avons rencontré un grand nombre de réalisateurs qui nous ont présenté les projets sur lesquels ils travaillaient à ce moment là, ce qui nous a aidé au fil de la sélection. D’autre part, nous nous sommes basés naturellement sur les inscriptions reçues durant l’année et avons opéré un choix parmi eux avec notre comité d’experts.
e-taqafa : Qu'est-ce qui a retenu votre intérêt à travers ces projets significatifs de la réalité marocaine aujourd'hui ?
Ananda Scepka : Les projets issus du Maroc témoignent d’une grande variété, tant thématique que stylistique, reflétée parmi les projets choisis eux-mêmes. Il a été intéressant de voir comment sont traités les rapports à la tradition et aux conventions sociales, aux questions identitaires, à la recherche d’une affirmation de soi et d’une liberté individuelle.
e-taqafa : Leurs courts-métrages ont-ils suscité votre attention en amont à travers d'autres festivals où ils ont été présentés ?
Ananda Scepka : Nous avons découvert beaucoup d’œuvres précédentes des réalisateurs qui présentent des projets de film grâce à leurs inscriptions, mais les court-métrages de certains d’entre eux nous étaient en effet, connus grâce à leur passage dans d’autres festivals.
e-taqafa : C'est important pour vous de suivre et de soutenir l'efflorescence de la jeune école de cinéastes qui émerge au Maroc ?
Ananda Scepka : Bien sûr, la recherche de projets de films forts non seulement de réalisateurs confirmés mais aussi de cinéastes émergents est très importante pour Open Doors. Ainsi, au Maroc nous avons essayé de rencontrer un maximum de jeunes diplômés d’écoles de film ou en général qui ont produit des court-métrages et se préparent à la production d’un premier long-métrage.
e-taqafa : Que vous inspire le 7art marocain ?
Ananda Scepka : L’impression générale retenue, révèle un grand dynamisme parmi les professionnels et une envie d’explorer avec la caméra sous un regard contemporain, toutes sortes de tensions et problématiques sociales ou individuelles. D’une manière générale, le Maroc nous semble offrir un cadre très propice à la production cinématographique. Le soutien offert par le CCM (Centre Cinématographique Marocain), est très précieux et représente une source de financements enviée, ailleurs.
Propos recueillis par Fouzia Marouf.