Le Maroc se trouve dans un contexte zonal des plus difficiles. La ceinture assez permanente des centres d’action anticycloniques des Açores ne promet rien d’autre que du beau temps clair, frais l’hiver, très chaud en été.
A l’instar des berceaux des grandes civilisations antiques, des terres de prophètes, des sols porteurs de projets à la mesure de l’histoire du monde… le pays a eu également sa part d’espaces arides.
Là-dessus, arrive une histoire de la Nature, fabuleusement riche, et qui a su, à travers les âges, le pourvoir de merveilleux facteurs de dépassement, pendant que l’histoire des communautés humaines a procuré d’ingénieux ressorts d’adaptation.
Le Sahara zonal cède la place au climat méditerranéen de rive sud.
Placé au S du 36ème parallèle de latitude N, et jusqu’au delà du Tropique du Cancer, le pays est, en principe, installé en plein dans le giron des climats des déserts subtropicaux de l’Afrique au N de l’Equateur. Sous ces latitudes, sa position, sur une façade occidentale de continent, lui donne un ancrage ferme et obligatoire dans les ambiances sahariennes, sans normalement espérer rien de plus avantageux qu’une frange steppique éventuelle sur sa bordure septentrionale.
Pourtant, de puissants facteurs de modération de l’extrême sécheresse zonale redoutée, ont parfaitement bien fonctionné, et la vérité du terrain s’en est trouvée, heureusement, profondément améliorée. C’est d’ailleurs vrai pour l’ensemble du Maghreb ; mais c’est nettement plus affirmé pour le Maroc, où le Sahara a été remarquablement repoussé vers le S.
En effet, la limite N du Sahara, qu’on pourrait, commodément et d’ailleurs assez justement, faire coïncider avec celle des palmeraies mûrissant leurs fruits, n’est repérée qu’assez loin au SW du pays, au niveau de la ville de Guelmime (Goulimine des cartes), significativement encore appelée « Bab Assahra » (porte du Sahara). Cette relégation du désert donne, à la moitié occidentale du pays, une profondeur méditerranéenne assez confortable, de l’ordre de 800km, depuis la Péninsule Tingitane. Une logique inexorable a amené cette bande méditerranéenne, nettement plus clémente, à se rétrécir au fur et à mesure de la progression vers l’E. Rendu en Algérie Orientale et en Tunisie, le décalage devient considérable, le front saharien ayant gagné jusqu’à 600km sur les latitudes septentrionales.
C’est, d’ailleurs, au Maroc que ce front est le plus facilement reconnaissable. Il y est, à peu près systématiquement, cantonné au S des Atlas, marqué qu’il est par un trait géomorphologique, quasiment schématique, très facile à identifier sur le terrain. Il s’agit de la ligne, en guirlande, des krebs nord des hamadas, rebord en corniche des plateaux sahariens caillouteux, qu’on peut suivre en continu sur près de 1200 km d’W en E, à travers l’ensemble du pays. Cette frontière, entre la bande aride présaharienne, qui souligne le piedmont méridional des Atlas, et le saharien effectif, plus au S, est d’autant plus remarquable qu’elle est en grande partie doublée par la frontière politique avec l’Algérie. Autant dire que, de ce côté central et oriental du S marocain, le pays n’a plus aucun accès au vrai Sahara morpho-climatique. Ces confins nationaux ont donc été réduits, par les avatars de l’histoire coloniale assez récente, à une simple frange présaharienne, sans issue, dans l’attente de l’avènement du Grand Maghreb.
Le Sahara atlantique est un désert atténué.
Par contre, près d’une cinquantaine de kilomètres à l’W du méridien de Tindouf, la voie s’ouvre largement sur les régions sahariennes marocaines de Saquia el Hamra et de Ouadi dDahab (anciennement Rio de Oro). Là encore, la règle est respectée ; une fois passée la ligne des krebs des hamadas, du Draa à l’E, d’El Gaada à l’W, on accède, cette fois tout à fait, au Sahara, en bonne et due forme.
Il y a, néanmoins, une nuance à considérer.
Zonalement, on est bien dans le Grand Sahara Africain, et climatiquement, le Sahara Atlantique marocain est, sans doute, une version de l’hyperaride saharien. Mais, la région connaît des températures remarquablement atténuées par l’océan et par son courant froid des Canaries, qui vient en baigner les côtes.
Ainsi, le Maroc est, en principe, davantage connu par son climat méditerranéen, même s’il comprend des espaces de grande aridité, sur plus de la moitié de sa superficie. Il semble que, jusque dans ses composantes les plus sèches et les plus engagées dans le Sahara africain, un assortiment de facteurs de mitigation arrive toujours à en maintenir la position en dehors de l’hyperaride, ou saharien authentique.